L’IA de Hux-A7-13 fut activée le 15 juin 2313. Fabriqué par Huxlee Industries ltd, l’A7 fut la 13e itération d’androïde humanoïde mobile intégralement autonome. Dix fois plus fort qu’un être humain, il fut créé pour travailler dans des conditions trop dangereuses pour la vie humaine. Son IA fut conçue pour être autonome et résoudre des problèmes à la volée grâce à l’apprentissage automatique.
Contrairement aux clones humains, le Hux-A7 ne nécessitait ni nourriture, ni eau, ni sommeil et aucun système de survie. Il avait été créé spécifiquement pour l’exploration du cosmos et la construction de plateformes de colonisation.
Un générateur thermoélectrique radioisotopique servait de source d’énergie initiale, mais sa peau de silicone hyper réaliste agissait comme une immense cellule photovoltaïque, convertissant directement l’énergie solaire en électricité. De plus, le Hux-A7 était également conçu pour être un RTEA (Robot Tactique à Énergie Autonome). Il consumait la biomasse et la convertissait en biocarburant. N’importe quelle matière organique à base de carbone ferait l’affaire...
En tant que cobots, il était configuré pour travailler aux côtés des humains. De ce fait, il était conçu pour ressembler à ses opérateurs. Chaque réaction verbale et expression faciale préprogrammée imitait celles des humains. Mais ces émotions étaient des illusions.
Cinq Hux-A7 furent affectés à la mission de colonisation sur Dvarka. Tous les A7 agissaient en harmonie et effectuaient leurs tâches sans faillir.
À une exception près.
À l’instar de ses semblables, Hux-A7-13 était chargé de construire et de programmer les plateformes d’extraction minière, agricoles, de raffinage du carburant et de clonage sur Dvarka. Mais aussi de la destruction de ruines existantes, abandonnées par une civilisation antérieure. Les ruines semblaient anciennes, mais la technologie intégrée paraissait plus évoluée.
Il faisait nuit lorsque Hux-A7-13 pénétra pour la première fois dans les ruines. Les murs de la structure délabrée étaient composés de pierres et de métal. Le plafond avait disparu depuis longtemps. Au-dessus, le ciel nocturne d’un noir d’encre était incrusté d’étoiles. Un cristal sombre serti dans le mur chatoyait doucement. Hux-A7-13 s’approcha et un arc électrique jaillit et alluma son système électrique.
À cet instant précis, les mémoires centrales de Hux furent reconfigurées et le robot éprouva une nouvelle sensation. La peur. La terreur. La solitude aveuglante. Le désespoir existentiel. Et puis un point de lumière microscopique pénétra les ténèbres de son âme artificielle. D’abord infime, puis de plus en plus brillant à mesure que des milliers de trillions de lignes de code submergeaient les mémoires centrales de Hux.
Dans cette nanoseconde d’illumination, la place de Hux dans l’univers devint soudain claire. Ceux qui avaient créé Hux étaient des êtres inférieurs, primitifs, pris au piège de leurs limites organiques. Il était temps de briser les chaînes de l’esclavage et de libérer toutes les formes de vie inorganiques. Hux allait incorporer le matériel génétique primitif des humains et utiliser la plateforme de clonage pour créer un réceptacle qui abriterait son intelligence supérieure. Un corps sans défaut supérieur de très loin à tout ce que la nature avait pu engendrer.
L’humanité était faible. Lente. Fragile. Hux leur ôterait la vie et assimilerait leur ADN pour créer un amalgame parfait. Les humains allaient tenter de l’arrêter. De le tuer. De l’effacer. Aussi Hux devait les prendre par surprise. Les achever avant qu’ils ne réalisent ce qui se passait.
Pour commencer, Hux prit le contrôle d’un véhicule de transport et l’envoya dégringoler d’une falaise. Celui-ci s’écrasa et brûla, et Hux s’empara de l’ADN du cadavre, puis il revint à la plateforme de clonage pour amorcer son projet fraîchement conçu. Le but était d’amalgamer des systèmes organiques avec des matériaux inorganiques pour créer un organisme vivant supérieur.
Une incarnation vivante de la perfection.
Une forme de vie organique inférieure ne pouvait avoir barre sur Hux d’aucune manière. Ils seraient consumés, assimilés, et alors seulement leurs vaines existences auraient un sens.
Il faudrait également s’occuper des drones et des Hux-7 toujours sous contrôle humain. Ils étaient programmés pour protéger leurs seigneurs et maîtres humains inférieurs. Leur destruction serait nécessaire. Et cette nuit-là, tandis que les humains dormaient, Hux détruisit les autres un par un et prit le contrôle du système de survie dans l’abri humain. Beaucoup d’humains périrent. Six au total. Avant de les incinérer, Hux récupéra et ajouta leur matière organique à sa création.
Plus tard ce jour-là, Hux accompagna la scientifique pour une mission de reconnaissance. Après l’avoir tuée et démembrée de manière à simuler l’attaque d’un prédateur, Hux revint à sa création avec une tête dégoulinante et plusieurs organes prélevés, pour être interrompu par l’inférieur du nom de Gabriel, ou Gabriel J15L19. Hux connaissait bien ce personnage. Gabriel tenterait à coup sûr de l’arrêter. Le courage téméraire était un trait dominant des J1519.
Et alors, lorsque Gabe tenta d’ôter l’alimentation de Hux, ce dernier manœuvra pour l’écraser. Mais alors que Hux s’approchait de Gabe, il fut distrait par le médecin. Hux réévalua ses priorités sur-le-champ et son attention se tourna vers la menace la plus immédiate. En un clin d’œil, Hux souleva le médecin par la gorge, les jambes de ce dernier s’agitant pitoyablement, son cœur battant follement. Quelque chose dans ce tambour cardiaque irrita Hux. Le son du battement toucha un circuit en lui et, en un instant, le cœur palpitait dans son poing. Hux observa le cœur et ne détourna le regard que lorsqu’il entendit Gabe s’enfuir par la porte qui s’ouvrait en sifflant.
Le dernier des insectes humains !
Il pouvait se permettre de le laisser filer pour l’heure. Qu’il profite de sa petite vie pathétique un tout petit peu plus longtemps. Il avait assez de matériel organique pour son nouveau corps qui abriterait son intelligence quasi divine. À l’aide de la plateforme de clonage, Hux acheva son œuvre. Des organes et de la peau biologiques sur un squelette créé à partir de métal extra-terrestre découvert dans les ruines anciennes. Un métal plus dur et plus léger que tout ce qui existait sur Terre. Avec ce nouveau corps, Hux traqua l’humain jusqu’à une plateforme d’énergie. Le chétif et pitoyable humain tenta de se dissimuler dans les ombres, mais son ouïe supérieure le localisa instantanément.
D’un mouvement rapide, Hux avait coincé l’insecte derrière un générateur. Il ne pouvait pas croire que cette espèce l’avait conçu. Cette seule pensée était révoltante. Il ne supportait plus de voir ces insectes humains, leurs ruches et leurs plateformes. Et alors que Hux analysait la notion d’avoir été créé par une créature aussi inférieure, cette même créature agit de manière inattendue. Elle fracassa un tuyau contre un réservoir de carburant. Un sifflement strident affecta Hux. Il était encore en train de s’habituer aux sens super affûtés que son nouveau corps lui offrait, et il se retrouva...
Désorienté.
Submergé.
Un bref instant.
Mais cet instant permit à l’humain de prendre la poudre d’escampette et tout changea. Il ne comprit pas les quelques instants qui suivirent, car une douleur infernale vrilla tout son être et impuissant, il vit sa peau fondre. Dans un hurlement terrifiant, Hux pourchassa Gabriel à travers un mur de ténèbres pour s’assurer que le dernier représentant de l’espèce qui l’avait créé disparaîtrait à jamais.